Pour la jeunesse arabe, le gouvernement d’un pays doit se faire sur des bases laïques et non avec un discours religieux
La chaine d’information arabe Al-Arabiya vient de diffuser sur deux jeudis successifs une émission de débat consacrée à la relation entre « l’Etat et la religion ». Hiwar Al Arabe (le dialogue des arabes)* a été présenté depuis le Liban et a vu la participation, en plus de certains religieux, hommes politique et professeurs, d’un grand nombre d’étudiants libanais.
Alors que l’information est passée sous silence dans la totalité des médias de la région, l’émission (qui a abordé un sujet polémique non tranché encore dans aucun des pays arabes) a vu le positionnement des étudiants participants dans une optique franchement anti-religieuse.
A l’occasion de ce qui s’apparente à un sondage, deux questions ont été posées aux dizaines d’étudiants présents. Lisez ci-dessous les résultats c’est assez intéressant :
1- Gouverner un pays avec les règles islamiques est-il compatible avec les principes de la citoyenneté ?
► Oui 18 %
► Non 68 %
► Je ne vois pas la relation 14 %
2- Peut-on réussir le mélange : culture musulmane - démocratie ?
► Oui 38 %
► Non 62 %
Ces résultats sont d’une importance capitale pour les raisons suivantes :
1- Un sondage avec ces mêmes questions dans n’importe quel pays arabe et en particulier dans les pays du Golf est complètement inimaginable.
2- Ces résultats montrent qu’auprès de la jeunesse (même s’il est question surtout de la jeunesse libanaise), les discours religieux perdent du terrain : beaucoup plus de gens pensent que la citoyenneté est un critère à prendre en considération plus que la religion dans la définition de l’appartenance d’une personne à un pays.
3- De plus en plus de jeunes pensent que la religion n’est pas (nécessairement) la solution à leurs problèmes et à ceux de la société, que la foi religieuse doit s’inscrire dans la sphère privée et que le gouvernement d’un pays doit se faire sur des bases laïques plutôt que sur des arguments religieux.
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Je l’ai déjà signalé sur ce blog : même si aujourd’hui l’islam continue de refléter une image d’une religion dangereuse et menaçante (surtout en Occident). Image véhiculée par les porteurs d’un discours islamophobe et aussi par nombre de musulmans, il existe quelques tentatives (certes encore trop faible) de reformes grâce à des gens porteurs d’une analyse critique des discours et autres comportements des défenseurs de l’islamisme.
Voir que ce nombre se développe et que des médias arabes de masses commencent à s’inscrire ouvertement dans une logique réformiste ne peut être qu’une bonne nouvelle ! Mais, disons le franchement : nous sommes juste au début du chemin et nous ne pourrons espérer un impact réel de ces tentatives de reformes dans les sociétés arabo-musulmanes que le jour où elles se transforment en un véritable courant de réformisme interne.
* L’émission est à revoir sur Alarabiya.net