Réformistes ou conservateurs… tous des islamistes ?
Depuis le début de la présidence d’Ahmadi Nejad, nombreux sont ceux qui regrettent l’ère Khatemi (1997-2005) durant laquelle les réformistes avaient leurs mots à dire sur la politique aussi bien intérieure qu’extérieure de leur pays. Seulement, ce qu’on oublie souvent, c’est qu’on Iran, plusieurs des réformistes sont des islamistes. Il s’agit principalement de religieux transformés en politiciens.
Ce mélange du religieux et du politique remonte aux premières années de la révolution islamique. Avant 1979, les mollahs refusaient d’avoir des postes dans l’exécutif afin de préserver leur indépendance et d’échapper aux influences politiques.
Mais depuis, les choses ont changés et les religieux iraniens sont devenus de véritables politiciens.
La première formation officielle qui regroupait des religieux était le parti de Joumhouri Eslami [République Islamique] qui regroupait plusieurs personnalités religieuses telles que Khamenei ou Rafsanjani.
Aussi bien, le radical Khamenei que le réformateur Rafsanjani était donc dans un seul parti politique. Mais la connivence ne durera pas longtemps. Car les élections se succèdent et les favoris du Guide Khomeiny (les conservateurs) étaient toujours gagnants dans les élections.
Une situation qui poussera le courant réformiste à sortir du lot et à fonder son propre parti. Et depuis l’Iran connait deux grands partis religieux : le parti des conservateurs de Rouhaniyat [Spiritualité], dite Association des clercs combattants, et le parti des réformateurs de Rouhaniyoun [Religieux spirituels], dite Association des religieux combattants.
Cette situation va pousser certains spécialistes à dire qu’en Iran il n’existe aucune différence entre les conservateurs et les réformateurs à partir du moment où tous sont issus de la même formation religieuse. Selon ces auteurs dont Ramine Kamrane et Frédéric Tellier (dans leur livre : « Iran : les coulisses d’un totalitarisme »), cette succession de réformateurs et de conservateurs et la soi-disant guerre qu’ils se livrent n’est autre qu’une mise en scène faite par le régime iranien afin de cacher les réalités du régime, pour le faire apparaître comme démocratique. Analysant l’arrivée au pouvoir d’Ahmadinejad, les auteurs affirment :
« Tant que le monde croit à un tournant majeur de la vie politique iranienne, tant qu’il voit dans l’avènement de cet ultra dont il prend systématiquement soin de souligner la fidélité aux idéaux de la révolution – comme si cette fidélité était en soi une exception au sein du personnel de la république islamique, la source de tous les problèmes rencontrés par le communauté internationale avec Téhéran-, alors toute la vigilance porte sur un homme plutôt que sur ce qu’elle juge être une politique individuelle au détriment de la logique collective de la république islamique (…).
Croire en effet qu’en juin 2005 [arrivée au pouvoir de Nejad] a eu lieu quelque chose de comparable à un tournant fasciste du régime islamique revient à penser que tout ce qui précède ne l’était pas. Il suffirait qu’Ahmadi Nejad disparaisse de la scène au profit d’une figure ‘‘réformiste’’ pour que, dans un élan de soulagement à la mesure de ses peurs, le monde célèbre ici comme sur tous les autres dossiers le « retour à la normale », voire la victoire de la démocratie, alors même qu’aucun cap parmi ceux suivis par Téhéran ne serait modifié »
© Islamiqua d’après Courrier International et « Iran : dans les coulisses d’un totalitarisme »