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Islamiqua | L'islam et son image
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29 juin 2009

Nejad a gagné mais… la révolution est en danger

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En découvrant le taux de participation historique (85 %) aux élections présidentielles du 12 juin, on s’attendait à un vote massif en faveur du candidat (le moins conservateur) Mir Hussein Moussavi, soutenu par les réformateurs et tous ceux qui étaient contre la politique de Ahmedinejad. Soutenant l_Iranl’idée que les électeurs ne se déplacent massivement que pour changer un gouvernement, nombreux sont ceux qui ont émis cette idée et ont criés –bien avant la proclamation des résultats- aux fraudes massives, et parmi eux Moussavi en personne qui avait tiré la sonnette d’alarme dès les premières heures de l’ouverture des bureaux de vote.   

Malgré cela et en dépit de l’auto-proclamation de sa victoire dans les élections, Moussavi aurait perdu –selon les résultats officiels- avec plus de 11 millions de voix de différence et n’aurait ainsi recueilli que 34 % des voix des électeurs, très loin derrière le président sortant.

Les arguments de fraudes ont été nombreux, plusieurs sont réalistes et d’autres pas du tout mais je pense que le Guide de la révolution n’a pas tort lorsqu’il déclare qu’on ne peut pas frauder 11 millions de voix. Il est donc (presque) sur que Ahmedinejad a remporté les élections, mais comment ?

Car, si on est d’accord pour dire que le président sortant n’a pas pu inventer de toute pièce 11 millions d’électeurs, il est incontestable que ce président populiste n’a pas eu seulement le soutien massif des classes les plus pauvres et des ruraux (33% de la population) mais surtout celui du Guide et des Gardiens de la révolution.

Pour ce qui est du Guide, l’Ayatollah Ali Khamenei, il a déclaré deux semaines avant les élections qu’il soutiendra le candidat qui affronte les grandes puissances, mène un train de vie modeste et n’a peur de rien. Autrement dit, Ahmedinejad.

Cette déclaration, ainsi que plusieurs autres signes de soutien à Nejad seront d’une importance capitale dans l’orientation du vote des iraniens. Car, il ne faut pas l’oublier, que la parole du Guide dans l’Iran de Wilayat al faqih (« le gouvernement des doctes ») est sacrée et que des millions de fidèles la suivent à la lettre. Ainsi, si le Guide soutient un candidat donné, cela veut dire des millions de voix supplémentaires pour ce candidat.

elections_presidentielle_iranienneConcernant les Gardes de la révolution, dont le nombre de toutes les fractions confondus serait au alentour d’un million et qui -par le biais de leur contrôle d’un bonne partie de l’économie de l’Etat (un tiers selon certains)- exercent une influence considérable sur des millions d’iraniens, ils ne pouvaient admettre la victoire d’un ‘‘réformiste’’ qui pourra mettre un terme à leur ambitions militaires (le nucléaire) et stratégiques (l’exportation de la révolution et le soutien du Hezbollah et du Hamas) en les privant de la manne financière secrète dont ils bénéficient (selon le rapport 2009 de l’office national chargé des audits, 1 milliard de dollars des revenus du pétrole a disparu. Les principaux bénéficières ne sont autres que les gardiens de la révolution dont le financement n’est connu que par quelques personnalités iraniennes dont le Guide de la révolution).

Ainsi, à travers le soutient de ceux qui se retrouvent dans ce personnage populiste, auquel s’ajoute le soutien du Guide, des gardiens de la révolution et de leurs partisans, Ahmedinejed est certainement parvenu a remporté les élections présidentielle du 12 juin dernier.

Mais qu’en est-il de l’avenir de la république islamique ?

En voulant préserver -à tout prix- l’institution de la présidence sous la tutelle des ultraconservateurs, le régime ne met-il pas en danger l’ensemble des institutions de la république islamique ?

Ramine Kamrane et Fréderic Tellier ont écrit dans un livre intitulé « Iran : les coulisses d’un totalitarisme » une idée « en apparence paradoxale » selon laquelle « Les crises générées par Téhéran protègent plus qu’elles n’exposent le régime islamique tant que la communauté internationale les appréhende au coup par coup, indifférente au dessein qui les relie. Elles détournent de la question du régime. » (p.21) Car, aux yeux des auteurs, tout ce qui se fait en Iran depuis la révolution de 1979 n’est autre qu’une mise en scène qui ne vise que la protection du régime islamique.

Et cela semble bien réussir jusqu’aux élections de 2005 : « Cette faculté de l’événement à occulter la question du régime est illustrée une nouvelle fois avec l’arrivée au pouvoir de Mahmoud Ahmadi Nejad, nouveau président de la république islamique d’Iran depuis juin 2005. tant que le monde croit à un tournant majeur de la vie politique iranienne, tant qu’il voit dans l’avènement de cet ultra dont il prend systématiquement soin de souligner sa fidélité aux idéaux de la révolution – comme si cette fidélité ne concernait que lui et quelques proches, comme si elle était en soi une exception au sein du personnel de la république islamique, la source de tous les problèmes rencontrés par la communauté internationale avec Téhéran-, alors toute la vigilance porte sur un homme plutôt que de porter sur un système, elle se concentre sur ce qu’elle juge être une politique individuelle au détriment de la logique collective de la république islamique. » (p.22)

Cette analyse des auteurs était très pertinente à partir du moment où jusqu’aux élections de 2005 « le sommet de l’Etat iranien n’était menacé par aucune surprise venue des urnes. Les ‘‘surprises’’ iraniennes ne peuvent en théorie concerner que le personnage –secondaire dans l’édifice institutionnel iranien- du président de la République. »(p.33) 

Mais avec les événements que connaît l’Iran depuis la proclamation des résultats des élections présidentielles, c’est désormais le régime dans sa totalité qui est menacé.

l_organisation_du_pouvoir_en_iranCar, la division que connaît (pour la première fois de son histoire) la république islamique après ces élections témoigne de l’existence d’une menace réelle pour le régime islamique. En effet, depuis sa naissance en 1979, jamais la révolution iranienne n’a connu une division aussi flagrante : Pour la première fois de son histoire les manifestants défient non seulement le pouvoir exécutif mais aussi le guide de la révolution. Pour la première fois, des religieux iraniens s’opposent ouvertement aux injonctions du guide Ali Khamenei, et pour la première fois on s’interroge sérieusement sur l’avenir de l’institution du Guide suprême. 

Ce tremblement qui risque de toucher les fondements même de la république islamique ne provient pas seulement des manifestations face aux résultats des dernières élections, mais d’un certains nombre d’éléments déclenchés par ces manifestations :

1-  L’opposition entre le Guide Ali Khamenei et un grand nombre de personnalités influentes du régime islamique :

L’histoire remonte à 1989, date de la mort de l’Ayatollah Khomeiny, fondateur de la république islamique. A l’époque, sa succession n’avait pas été envisagée surtout que son dauphin présumé l’Ayatollah Ali Montadiri est tombé en disgrâce -quelques mois seulement avant la mort du Guide- pour avoir ouvertement critiqué l’assassinat de milliers d’opposants politiques dans les prisons iraniennes. Une prise de position qui provoquera les foudres du Guide pour lequel Montadiri est un « naïf » qui « n’est pas un homme d’Etat capable de diriger un pays ».

C’est ainsi que le choix du guide après la mort de Khomeiny revenait à l’Assemblée des experts présidée par Hachemi Rafsandjani qui fera tout pour faire élire Khamenei au poste du Guide alors même qu’à l’époque ce dernier n’était pas considéré comme la plus haute personnalité religieuse de l’Etat. Dans une déclaration à Newsweek, un témoin de l’époque jure que « sans le soutien de Rafsandjani, jamais M. Khamenei n’aurait accédé au poste de Guide suprême. J’ai vu comment il a travaillé jour et nuit afin de convaincre les membres de l’Assemblée des experts et les grands Ayatollah de soutenir Khamenei. Et malgré que M. Khamenei n’avait pas les compétences religieuses requises pour le poste, les mollahs ont donnés raison à Rafsandjani parce qu’ils lui faisaient confiance. Il est incontestable donc que M. Khamenei doit son poste à Rafsandjani. »

Or la relation entre les deux hommes va se dégrader très vite et Rafsandjani qui s’attendait à un petit geste de reconnaissance pour ce qu’il a fait, découvre avec stupeur -à l’occasion de sa candidature aux élections présidentielles de 2005-, que  le Guide –avec lequel il est désormais en désaccord sur plusieurs sujets- a choisi de soutenir le maire de Téhéran, le populiste Ahmedinejad.

Rafsandjani n’a jamais pardonné au Guide ce soutien et a critiqué durant les 4 dernières années les politiques de Nejad. Il ira même jusqu’à soutenir les réformateurs et leurs candidats. Désormais ce qu’il vise c’est la chute de Nejad et après lui (probablement) celle de … Khamenei. Car, a en croire certains, Rafsandjani aurait pensé durant les premières journées des manifestations à destituer le Guide (à travers l’Assemblée des experts). Mais il aurait renoncé à le faire, sachant qu’une telle décision conduirait à la chute de l’ensemble des institutions de la république islamique.

Rafsandjani est certes le personnage le plus influent qui critique désormais ouvertement les prises de positions du Guide, mais il n’est pas le seul. Plusieurs religieux n’hésitent plus à le faire profitant des erreurs du Guide dans la gestion de la crise et surtout de son manque de charisme. 

2- L’absence de charisme du Guide de la révolution :

Comme le souligne Christopher Dicky dans Newsweek, pour ceux qui ont connus le fondateur de la République islamique, l’Ayatollah Khomeiny, le guide actuel de la révolution n’est qu’un faible successeur du formidable orateur que fut Khomeiny. L’homme qui ne possède aucun charisme a été considéré au départ un ‘‘Guide de passage’’ qui n’occupera les fonctions que jusqu'à ce qu’une personne plus compétente le remplace. Mais il a su durant deux décennies garder sa position à travers l’instauration d’un équilibre entre les différentes institutions et en se montrant au-dessus des mêlées. Seulement, avec son soutien explicite à Ahmadinejad, le Guide a transgressé les règles qu’il s’était imposé donnant à ses adversaires les arguments pour le critiquer et contester ses injonctions. Le signe le plus important de cette révolte est sans doute ce qui s’est passé dans la prière du vendredi 19 juin. Ali Khamenei a ‘‘ordonné’’ à tous les candidats (y compris Nejad et Moussavi) d’assister à la prière sous sa conduite et a invité pour l’occasion les médias étrangers afin de montrer l’unité de la classe politico-religieuse iranienne derrière son guide suprême. Peine perdue, car Moussavi et Karoubi n’ont pas donné suite à l’invitation du guide montrant au grand jour non seulement leur opposition à la victoire de Nejad mais aussi leur refus de la prise de position du Guide.

Ainsi, nous voyons comment, alors même que l’institution de la présidence de la République n’est que secondaire dans l’organisation du pouvoir iranien, la volonté des ultraconservateurs de la garder sous leur influence les a conduits à truquer des élections qu’ils auraient de toute façon gagnées. Faisant entré le pays dans une crise de laquelle la République islamique ne sortira pas indemne.

A lire aussi sur ce sujet :

Le dossier Islamiqua sur l’Iran

Une critique, une suggestion, un complément d’information ? … merci de poser vos commentaires

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Commentaires
J
Bonjour,<br /> <br /> Regardez bien l'organigramme donné par M. Belloumi ...<br /> <br /> L'Iran est gouverné par des "prêtres" !!!<br /> <br /> Si un Musulman de ce forum peut me citer un SEUL exemple d'une telle situation en France depuis 1500 ans ...<br /> <br /> On voit bien que l' islam n'a rien à voir avec le Christianisme:ses concepts sont TOTALEMENT incompatibles avec ceux de la France ...<br /> <br /> En conséquence la pratique de l' islam , parti politique totalitaire , devrait être INTERDITE sur notre sol.<br /> <br /> C'est logique:je pense que les immigrés musulmans n'ont pas fui leurs pays pour retrouver JUSTEMENT cette abomination CHEZ NOUS ...<br /> <br /> Amitiés.
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